Un costume trop petit
Trop longtemps les DRH, fonction support hautement nécessaire mais largement sous-évaluée, ont fait figure de directeurs administratifs. Un costume (voire, bien souvent, un tailleur) devenu trop petit alors que l’humain—les femmes et les hommes qui constituent l’entreprise—se place au cœur des questions de compétitivité.
Pas moins de 3 millions d’emplois sont menacés d’ici 2025 par la robotisation. La transformation devient permanente et le DRH, acteur central de la transformation, ne peut plus se cantonner aux tâches administratives. Il est devenu vital de prendre le temps de plancher sur des solutions qui concilient un nouveau besoin d’agilité et la recherche traditionnelle de pérennité. Comment ? En permettant tout simplement aux DRH d’accéder à une nouvelle fonction ressources humaines, bien plus stratégique.
Réhumaniser l’entreprise
Dans un monde de finance, l’humain était « naturellement » considéré comme soupape idéale en cas de crise. Dans un monde qui a appris de ses erreurs, l’humain ne peut plus être la variable d’ajustement de l’entreprise. Le rôle du DRH aujourd’hui, c’est de replacer l’humain au centre, parce qu’investir sur l’humain c’est non seulement éthique—cela sert le collaborateur—mais c’est aussi pragmatique—cela profite à l’entreprise.
Là où le PDG d’hier s’assurait du bon fonctionnement de son entreprise pour pouvoir délivrer des dividendes à ses actionnaires, le PDG d’aujourd’hui s’est mué en ambassadeur de la marque et principal relai de la communication, pour incarner une entreprise qui saura dénicher les talents à plus forte valeur ajoutée. Et de manière générale, les directions générales gagneraient à tendre plus souvent l’oreille du côté des ressources humaines, et les placer sur un pied d’égalité avec les directions financières et marketing qui se sont habilement frayées un chemin jusqu’aux réunions les plus stratégiques. Le DRH peut en effet incarner un bras droit de poids, mais la fonction ressources humaines, fonction support par excellence, doit prouver sa valeur si elle veut s’émanciper de sa fonction administrative. Dans quel intérêt ? Selon une étude de la Harvard Business Review, les salariés heureux sont plus productifs de 30%, leurs ventes sont supérieures de 37% et leur créativité est multipliée par 3. CQFD.
Réinventer l’expertise RH
Cependant, le bien-être au travail n’est pas l’unique cheval de bataille des RH, bien au contraire. Guerre des talents, politiques de rétention des employés, prévision des effectifs sur le long terme, développement des compétences, transformation digitale… La fonction ressources humaines se dote de pratiques, de partenaires et d’outils qui lui permettent de peser dans les décisions de l’entreprise. La HR Tech, composée des centaines de start-up RH, participe activement à ce changement de paradigme : SIRH, baromètres d’entreprises, smart recruitment, formation… L’infinité des possibles amenés par le digital propulse les RH vers de nouvelles dimensions.
De la même manière, les métiers n’ont plus le choix. Taper sur les RH ne peut que les desservir et les priver d’une vision à long terme indispensable. Inviter les RH à la table des discussions, c’est comprendre que les données RH permettent d’anticiper non seulement le recrutement et la gestion de l’attrition, mais aussi l’acquisition de nouvelles compétences, la planification de mobilités et le développement stratégique des équipes. Les collaborateurs, loin d’être en reste, doivent également retrouver confiance en la fonction ressources humaines qui dispose désormais de tous les outils pour les accompagner dans leur développement, leur quête de sens, et in fine leur épanouissement professionnel.
Alors plutôt que de tailler un costard au DRH, ne lui en offrirait-on pas simplement un nouveau—à sa taille ?
Tribune écrite par Jocelyn Muret, président et co-fondateur d’Akoya. Publiée par Focus RH le 8 mars 2017.